Ouf! Le concert approche

Vous avez beaucoup improvisé, les gens s’amusent comme des fous, et maintenant, le concert approche à grands pas. Que faire? Je vous dirais d’improviser en concert comme vous le faites déjà. Sinon, vous pouvez opter pour une approche légèrement plus compositionnelle. Prenons S’amuser avec les sons filés – l’article de blog précédent – comme point de départ, et allons un peu plus loin…

La règle principale du jeu reste la même : vous pouvez faire un son filé ou un silence. Ensuite, pour ce qui est du choix de notes… Réalisez plusieurs versions du jeu en vous servant d’ensembles de notes divers (voir l’article précédent ou créez vos propres ensembles). Votre groupe a-t-il une préférence pour certains ensembles de notes? Déterminez les ensembles de notes préférés de votre groupe, et demandez à une personne d’en « diriger » l’exécution en indiquant au groupe l’ensemble de notes à jouer ainsi que la durée désirée.

Exemple de score.

Choisissez plusieurs chefs – chaque chef dirigera l’exécution des ensembles de notes à sa façon, et à une cadence qui lui sera propre. En tant que tel, c’est fascinant à observer. Pour le concert, demandez au public de deviner les règles du jeu; ensuite, faites diriger ce même jeu par vos trois chefs les plus enthousiastes – les publics adorent, car ils y perçoivent le niveau d’engagement qu’implique la création musicale… tout en pouvant y participer!

S’amuser avec les sons filés

Je suis geek, je l’avoue – j’aime faire des sons filés sur mon instrument, même après 30 ans de jeu. Il s’agit d’une occasion méditative qui me permet de tout oublier et de me plaire à produire du son. J’y trouve une certaine poésie, mais je réalise que ce n’est pas le cas pour tout le monde! Or, la pratique des sons filés améliore incomparablement le jeu de mes élèves. Que faire, alors, pour la rendre intéressante et inspirante pour les moins-geek-que-moi? Ah, j’ai tellement de stratégies…

Son et silence

Instrumentation : vents, cuivres, cordes, percussions mélodiques
Âge et niveau d’habileté : tous les âges, intermédiaire à avancé
Nombre de participants : 6-35

Depuis longtemps, ma méthode de prédilection pour travailler les sons filés est un jeu musical où les instrumentistes ont deux choix :

  1. jouer un son filé
  2. jouer un silence
Campbell, Son et silence

Les sons filés et les silences peuvent se chevaucher n’importe comment, ce qui crée des textures et des timbres qui évoluent au fil des entrées et des sorties intercalées des instrumentistes.

Campbell, Son et silence, une variation

La hauteur des notes peut être prédéterminée ou non. Voici des exemples d’ensembles prédéterminés de notes :

Choisissez parmi :

  1. Un mi situé dans n’importe quel registre
  2. N’importe quelle note d’un accord spécifique (par exemple, do majeur ou mi mineur)
  3. N’importe quelle note d’une gamme spécifique (par exemple, une gamme pentatonique ou une gamme de ré majeur)
  4. N’importe quelle note d’un tétracorde tel que (0, 1, 2, 6) ou do, do dièse, ré, fa dièse
  5. N’importe quelle note de la gamme chromatique

Pour toute option, l’exécution peut se prolonger pendant un certain temps. Encouragez l’écoute et le dialogue musical chez vos participant·es. Chaque groupe – y compris le vôtre – arrivera à un traitement différent des matériaux.

La prochaine fois, on verra comment transformer ce jeu en processus collaboratif de composition.

Poèmes sonores

« Tu veux que je fasse quoi? Oh non, je chante vraiment très mal… »

Quel·le musicien·ne n’a jamais entendu ou prononcé ces paroles? Au quotidien, la plupart des gens parlent. Toutefois, demandez-leur de chanter, et voilà qu’une panoplie d’insécurités se manifestent. En ce sens, j’ai plusieurs façons de mettre les gens à l’aise en contexte musical. Entre autres, je les invite à jouer avec la sonorité des mots.

Poème sonore de dix secondes

Instrumentation : voix
Âge et niveau d’habileté : tous les âges; aucune formation musicale n’est nécessaire
Nombre de participants : 6-35

Choisissez un sujet et faites un brainstorming pour trouver des mots qui s’y rattachent. Parmi mes groupes, on a déjà opté pour des noms de lieux, des thèmes liés aux saisons ou aux phénomènes naturels, et des expériences partagées. Dirigez la conversation afin qu’on y relève des onomatopées, soit des mots dont la sonorité rappelle le sens.

Par exemple, prenons l’eau :

Bloub, fschhh, bing, plouf, ploc, gloup, sploush, splotch, plic, plop, glouglou, splaf, pschitt…

La liste ne s’arrête pas là! Lancez un échange ludique avec vos participant·es où on explore une variété d’inflexions et de prononciations. On peut vocaliser le son sploush ou le chuchoter, l’étirer ou l’écourter, y incorporer des s sifflants ou un chhhh bien prolongé…

Ensuite, écrivez chaque mot sur un bout de papier et demandez à chaque participant·e de choisir un mot au hasard.

Ensuite, dirigez un Poème sonore de dix secondes : en tant que chef, indiquez le début d’une série de segments de 10 secondes. Chaque participant·e dit son mot à un moment donné pendant un de ces segments. Par exemple, je pourrais dire splouuuuuuuuuush au début – ou à la toute fin – d’un segment de dix secondes. Comme les participants vocalisent leur mot à leur façon et à intervalles variés, chaque segment de dix secondes est unique.

Le Poème sonore de dix secondes peut prendre plusieurs tournures. Le ou la chef peut modifier la durée des segments en les raccourcissant, en les allongeant, en accélérant ou en ralentissant leur cadence. Remplacez le ou la chef, ou désignez plusieurs chefs. Choisissez de nouveaux mots. Allez découvrir cet enregistrement d’une co-composition réalisée en classe selon ce procédé par mon groupe Sing! – notre création nous a bien surpris·es!

Water poem, composition collaboratif et performance par les participants de Sing!, printemps 2017

Les moyens du bord

Rebienvenue, tout le monde! Pour lancer la haute saison en grand, voici une anecdote en lien à la créativité en musique.

Il était une fois… je me suis cassé le bras. J’ai eu affaire à une fracture simple, et les os se soudent – bref, ça n’a pas été la catastrophe. Cela dit, quand une musicienne se casse un bras, il s’agit quand même d’un événement majeur. Après avoir reçu beaucoup de soins professionnels, mon bras s’est replacé normalement… et, en plus, je me suis mérité une cicatrice pas mal impressionnante. J’allais pouvoir rejouer! Super!!!

Euhhh… Oups. La patience n’étant pas un de mes atouts, j’y suis allée un peu trop fort. Je savais que ce n’était qu’une question de temps, mais j’avais envie de jouer. Mon bras n’avait simplement pas l’endurance nécessaire pour jouer très longtemps. En fait, au quotidien, il semblait s’essouffler au bout 10 minutes. Je n’ai jamais eu l’habitude de pratiquer pendant de longues heures, mais même pour moi, 10 minutes, ce n’est rien. J’ai donc décidé que j’allais jouer avec mes deux bras tant et aussi longtemps que mon bras nouvellement guéri pourrait le tolérer, et que je ne poursuivrais ma pratique qu’avec mon « bon » bras une fois que l’autre serait épuisé.

Le défi à surmonter était donc le suivant : j’allais devoir éviter de me servir de mon bras gauche pour jouer de la clarinette. La main gauche s’occupe du corps du haut de la clarinette; elle est essentielle à tous les doigtés. Voilà que j’allais devoir me passer du corps du haut.

Allais-je pouvoir jouer de la clarinette en ne me servant que du corps du bas? Heureusement, j’ai réussi à faire entrer mon bec dans le corps du bas. Tout à coup, je me suis retrouvée avec une « clarinette pour droitière », mon bras gauche a pu prendre une pause bien méritée (… ouf…!), et j’accédais à un monde de sons entièrement nouveau.

Ce blog porte sur la création musicale pour tout le monde – alors pourquoi est-ce que je raconte cette histoire? Parce que la créativité s’épanouit au maximum lorsqu’on doit trouver des façons de travailler en respectant des contraintes. Quand je me suis fracturé le bras, je ne m’attendais pas à découvrir la demi-clarinette, un nouvel instrument. En fait, je ne l’aurais jamais imaginé – mais quand j’ai dû trouver une façon de faire de la musique avec les moyens que j’avais, j’ai trouvé. Depuis ce moment, les découvertes qui en ont résulté ont pris beaucoup de place parmi mes activités de création. Voici Songbird, une œuvre pour demi-clarinette et loop station que j’ai composée et interprétée.

Je me sers de cette anecdote pour capter l’attention des musiciens amateurs et pour les encourager à penser en exerçant leur créativité. Si on se sent limité, (« je n’ai jamais pris de cours de musique » ou « je ne suis pas chanteur·se »), quel est donc l’envers de la limite en question? Au plan pratique, comment ces limites peuvent-elles vous amener à créer une musique qui ne vous aurait jamais effleuré l’imagination?

Bonne rentrée, tout le monde!

 

Jouer au jeu de la musique… en mode « pep rally »!

On vous a déjà demandé de diriger un atelier de musique créative pour plus de 120 adolescentes? Ça m’est arrivé – et je me suis vraiment amusée au Trafalgar School for Girls. J’étais un peu nerveuse – ça fait beaucoup de monde, et quand les ados sont enthousiastes, ils et elles dépassent vos attentes, mais sinon… eh bien, un atelier peut facilement s’avérer très laborieux. Comment allais-je donc faire pour susciter l’enthousiasme et l’engagement de ces filles dès le départ?

Lorsque je travaille avec des amateurs, ma tâche première consiste à les mettre à l’aise, puisque la créativité se manifeste spontanément chez les gens qui rient et qui s’amusent. En ce sens, les jeux sont très utiles. Je n’ai pas ménagé mes efforts, comme j’ai dirigé l’atelier à « Traf » en m’inspirant des pep rallies qu’on organise dans les écoles secondaires anglophones : j’ai organisé un jeu musical participatif lors duquel les filles ont composé, chanté et dirigé leur propre jeu musical en se basant sur celui qui s’appelle Fruit Salad.

Fruit Salad

Les partitions suivantes sont inspirées d’un jeu musical qui consiste à répéter et à combiner trois fragments chantés de quatre temps pour une durée indéterminée. J’ai fait usage de plusieurs variations sur ce procédé dans une variété de contextes : lors d’une exploration musicale avec 30 enfants dans un camp de jour; lors d’un cours de composition offert à six adultes; et lors de pep rallies baptisés Allez (le nom de votre école secondaire)!

Instrumentation : voix
Âges : 7 ans et plus
Nombre de participants : de 6 à 100 (ou plus)

J’emploie le procédé selon lequel on superpose des chants rythmés, et je l’adapte en créant des chants rythmés de longueurs variées. Typiquement, ceux-ci comptent 3, 4 ou 5 temps. Comme ils sont de durées différentes, ils s’intercalent lorsqu’on les répète. Dépendant du contexte, je compose ces fragments comme je l’ai fait pour la partition suivante, destinée à des enfants de 6 à 10 ans.

Fruit Salad. Répéter chaque fragment pour une période indéterminée. Les encadrés indiquent les mots à omettre ou à rajouter (voir Le jeu).

Lorsque c’est possible, j’invite les participant·e·s à composer ces fragments, ce qui stimule leur implication au plan créatif et leur permet de s’approprier la partition résultante. Les fragments suivants sont tirés d’une partition composée par des élèves en musique de la Trafalgar School for Girls (sous les conseils de Kirsten Offer, leur enseignante de musique) sur le thème d’ArtsFest, soit le festival bisannuel de leur école qui fait plein feux sur les arts. Mis à part les fragments contenus sur cette partition, plusieurs autres chants ont été composés; j’ai choisi et adapté ceux qui s’adapteraient bien au contexte d’un pep rally réunissant plus de 120 personnes.

Allez, Traf! Chant ArtsFest, Trafalgar School for Girls

Le jeu

Trois chefs dirigeant chacun des fragments. Fort, plus fort, et « en mode détente ». Trafalgar School for Girls

Voilà qu’on doit transformer ces partitions en jeu : d’abord, les participant·e·s doivent apprendre les fragments par cœur. On choisit un·e ou des chef(s) d’orchestre qu’on charge d’indiquer les nuances, les entrées et les sorties. Que se passe-t-il si tout le monde commence en même temps? Que se passe-t-il quand les fragments de 3 et de 4 temps commencent fort et se poursuivent decrescendo? Que se passe-t-il si une seule personne entame le fragment de 5 temps en le chuchotant?

Ensuite, on choisit un mot ou une expression parmi chacun des fragments et on le remplace par un silence. Ensuite, on en omet un autre. Et un autre. On remet un mot ou une expession ayant été enlevé. On rajoute et on enlève des éléments de différentes façons à chacun des fragments. Les carrés gris renfermant des mots dans les partitions ci-dessus présentent une façon, parmi d’autres, de regrouper des mots et des expressions afin de les enlever ou les rajouter. Portez une attention particulière aux choix que vous effectuerez en ce sens pour votre partition – ceux-ci auront un impact énorme sur la groove ou la carrure rythmique de votre pièce. Des mots et des figures rythmiques différents seront mis en relief et s’aligneront de façons variées et surprenantes, tout dépendant du moment et de la méthode employés pour l’ajout ou l’omission de mots et de phrases.

Maintenant, trouvez une façon de rajouter et omettre des mots dans le feu de l’action : inventez des signes de main pour indiquer les inclusions et les omissions. Écrivez les fragments sur un tableau blanc; couvrez et découvrez ces mots avec des bouts de papier. Pour ce qui est de votre direction, faites preuve de créativité! Mieux encore, invitez vos participant·e·s à proposer d’autres façons de diriger le jeu. Chaque groupe vous offrira des solutions différentes; la même partition résultera ainsi en une diversité de pièces. Amusez-vous bien!

Allez, Traf! Musique inspirée des « pep rallies ».

 

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